Depuis quelques années les thés en
feuilles, que l’on nomme aussi plus prosaïquement les thés en vrac, occupent
une part croissante du marché en France, estimée à plus de 10% du volume total par Olivier Scala, le Président du Comité Français du Thé,
ce qui est considérable. Une tendance qui semble se confirmer vers plus de thés
fins et de thés d’origine, que les amateurs de thé comprennent de mieux en
mieux et apprécient de plus en plus. C’est donc intéressant de regarder de plus
près comment s’applique ce « mantra » de cueillette fine et comment
il est géré dans le quotidien des plantations.
Bien sur tous les connaisseurs
savent qu’il y a deux grandes familles de théiers,
**les camellias sinensis
var.sinensis : les théiers à port buissonnant originaires de Chine, aux
petites feuilles assez vernissées et qui
se portent à merveille en altitude, et qui ont besoin d’une période de dormance
en hiver et offrent des tasses aux multiples senteurs et flaveurs qui éclatent
à la reprise de la végétation au printemps ; les experts disent que ces
tasses du printemps ont souvent plus de nez que de bouche, mais heureusement
souvent elles ont les deux
**les camellias sinensis
var.assamica : les théiers au port arbustif, originaires du triangle d’or
du thé, qui va du Yunnan en Chine à l’Assam en Inde, passant par le Nord du
Vietnam, le Laos et la Thaïlande, qui n’ont pas toujours besoin de dormance et
qui possèdent généralement des grandes feuilles souples et peuvent supporter
les chaleurs torrides des plaines et n’aiment pas beaucoup les frimas.
Chaque fois que l’on cherche à
annoncer une règle en matière de thé on constate qu’il y a tellement de
situations spécifiques et d’exceptions, que la règle semble vacillante dès le
départ. Ainsi font partie de la grande famille des assamica les théiers Puer,
qui grimpent pourtant jusqu’à plus de 2000m dans les chaînes de montagne qui
fourchent le Yunnan et dont les cueillettes printanières sont d’une finesse
succulente incroyable, avec leurs premiers bourgeons velus, couverts d’un duvet
blanc.
Les théiers font montre d’une
vigueur incroyable et génèrent des nouvelles pousses environ tous les 15 jours,
à condition de bien les entretenir, donc de les tailler régulièrement et de ne
pas les laisser fleurir. Ces arbustes et petits arbres font donc l’objet d’une
cueillette régulière, en anglais on appelle cela « picking round »,
en sorte que les feuilles que vous trouvez dans vos tasses sont toujours jeunes
et tendres. Et donc pour les thés de qualité le principe établi selon une
expérience séculaire prévoit que les cueilleuses- effectivement les femmes des
villages dans la plupart des pays d’Asie- ne prélèvent que les bourgeons et les
deux feuilles, qui sont les plus tendres et les plus riches en saveurs et
substances bénéfiques.
En Chine, où il y a une tradition millénaire
et un nombre important de thés de terroir il y en a pour les quelles les
cueillettes premium ne prélèvent que le bourgeon, ou alors le bourgeon et une
feuille, mais ce sont des exceptions et ces thés sont assez rares et chers en
sorte que l’on en trouve que peu à l’export. Les thés fins sont donc
généralement cueillies manuellement, par les milliers, voire millions de petits
fermiers, qui apportent leur récolte aux usines des coopératives et des grandes sociétés.
voilà pour le tri des feuilles prélevées |
Il est bon de savoir que ces règles
de bonne cueillette s’appliquent aussi aux thés CTC, les thés noirs que l’on
passe dans les tambours à déchiqueter pour favoriser une oxydation régulière et
rapide. Ces thés que l’on pourra mettre en sachet ou vendre en vrac sont très
recherchés dans les pays du Moyen Orient et en Asie Centrale.
Par le fait de la cueillette manuelle sélective et sur des théiers bien entretenus on obtient des tasses aux fortes saveurs et bien colorées, parfaites avec un peu de lait. Sans amertume ni astringence ces tasses délicieuses se payent au prix fort, à condition que les directeurs des manufactures veillent au contrôle suivi des cueilleurs.
Par le fait de la cueillette manuelle sélective et sur des théiers bien entretenus on obtient des tasses aux fortes saveurs et bien colorées, parfaites avec un peu de lait. Sans amertume ni astringence ces tasses délicieuses se payent au prix fort, à condition que les directeurs des manufactures veillent au contrôle suivi des cueilleurs.
l'équipe qui contrôle |
Pour vous montrer comment cela
fonctionne en pratique voilà une expérience toute récente en Indonésie, à
West Java: une équipe qui est relayée
toutes les six heures va contrôler des prélèvements de 200g de feuilles par
groupe de 60 cueilleurs, dans cette
plantation où on ramasse environ 50 tonnes de feuilles fraîches par jour.
Rapidement les feuilles de cet échantillon vont être réparties dans une boîte à
six cases avec l’objectif de voir au moins 50% dans les 3 cases qualité ;
si non le lot est éliminé. C’est impressionnant à observer, cela va vite, tous
les lots sont contrôlés ! Et ces thés sont tellement bons et demandés que
les clients les payent à la commande pour être certains de les recevoir,
bravo !!
Tout le secret réside donc dans
une cueillette nette et sélective qui ne ramasse que des feuilles entières,
sans blessure ni flétrissure, portées à l’usine rapidement dans des paniers,
sacs etc qui évitent tout écrasement et donc oxydation anticipée. Ces exigences
font partie du débat sur la mécanisation des récoltes, car jusqu’ici les outils
n’ont pas encore l’habileté de la main des cueilleurs.
Lors de vos achats vous pourrez
normalement constater la qualité de la cueillette en regardant les feuilles
sèches, si non c’est après l’infusion, en dépliant les feuilles réhydratées.
Dans certaines maisons de thé on vous
sert la théière préparée et à côté les feuilles infusées, vous permettant ainsi
de vous rendre compte -en direct,de près et en nature- de la qualité
de votre boisson ; merveilleusement instructif ! et également
délicieusement aromatique !
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