C’est tout d’abord une question de terminologie : en
Occident il est depuis longtemps d’usage d’appeler les thés complètement oxydés, et donc aux
feuilles très foncées, des thés noirs.
C’est le retour en puissance de l’industrie chinoise du thé,
à partir des années 1980/90 qui à permis de retrouver des thés chinois
traditionnels, que l’on avait perdus de vu depuis la rupture de la révolution
culturelle. Ce retour des richesses en thés de terroir et en thés de couleurs
autres que noir, qui ressortaient de l’oubli dans le quel ils étaient tombés
pendant des décennies, a posé la
question d’une nomenclature appropriée. Des experts se sont donc tournés vers
les manuels chinois du thé, pour traduire en premier les noms des grandes
familles, classées en fonction de la couleur des feuilles infusées et des tasses.
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le rouge par opposition au vert |
Les thés pleinement oxydés présentent des tasses
allant d’un rouge marron à un rouge plus vif, mais ce sera toujours une couleur
proche du rouge, en Chine ces thés ont donc toujours été appelés "Hong Cha", ce qui veut dire thé
rouge en traduction.
De nombreux thés oxydés africains donnent aussi de belles
tasses d’un rouge souvent cuivré, alors que les thés oxydés de l’Inde donnent
des tasses plus foncées, en notes de marron.
Au Sri Lanka il y a aussi de très belles tasses rouges.
Toutefois la majorité des connaisseurs estiment judicieux de
réserver le terme " thés rouges" aux thés pleinement oxydés de
Chine, alors que les thés pleinement oxydés des autres pays producteurs gardent
leur dénomination traditionnelle de "thés noirs" .
Conclusion : les thés rouges et les thés noirs sont tous les deux des thés pleinement oxydés, mais ils sont d’origine différente, les "rouges" venant tous de la Chine
Rappelons qu’en Chine la traditionnelle consommation est
celle de thés verts ! il y a néanmoins quelques autres catégories à petites
productions locales qui sont les thés blancs et les thés jaunes, à peine
oxydés, et puis les thés bleu vert, ou
thés Wulong, qui sont partiellement oxydées et puis les thés sombres, de garde
et de transport chez les peuples frontaliers, départ aussi des thés verts.
Les thés rouges sont pour la très grande majorité des
créations du 19e siècle et destinés à
l’exportation ; les experts pensent que parmi les premiers thés rouges
ainsi " crée"pour voir ce que
donnerait une complète oxydation de cette fine cueillette sont les Keemun ou
Qimen, originaire du district Qimen, au sud ouest du massif des Huang Shan, de
la province d’Anhui.
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feuilles calibrées pour l'export à gauche |
La légende attribue cette première expérimentation à un
fonctionnaire retraité, qui voulait répondre à la préférence des Européens
pour les thés oxydés ; lancé en 1875 ce nouveau thé rouge de Qimen, aux petites feuilles
hautement aromatiques a remporté immédiatement un superbe succès ! Un bel exemple d’un
thé de terroir transformé de manière innovante, qui a su mettre en valeur la richesse
en saveurs de cette variété locale.
D'autres régions ont suivi l’exemple : entre la fin du
19e et les débuts du 20e siècle on a crée plusieurs thés rouges de grande qualité avec
les récoltes fines des théiers propres à
ces divers terroirs, comme le Dian Hong du Yunnan, le Yingde Hong du Guangdong,
le Yi Hong du Hubei et le Ning Hong du Jiangxi, à ne pas oublier le Zhengshan
Xiao Zhong, ou Lapsang Souchong, qui subit en plus un fumage aux branches de
pin.
Tous ces thés rouges
ont gagné de nombreuses médailles dans les expositions mondiales des années
1900 et se sont fait une grande réputation en Occident. D’autres créations de
thés rouges ont suivi : à citer les Chuan Hong
du Sichuan et le Panyong du Fujian.
Une belle création toute récente est le Jin Jun Mei, qui a été "inventé" en 2005/6 dans le Fujian, Wuyi Shan : c’est une cueillette unique
printanière sur les théiers qui fournissent le Lapsang Souchong ;
très
riche en bourgeons et complètement oxydée cette nouveauté à la tasse délicieuse
est proposée à près de 1000€ la livre au marché de gros , on en trouve pas vraiment à l'extérieur.
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un Jin Jun Mei, à la China Tea Expo en 2012 |
Les thés rouges sont classés en 3 groupes :
** les Gong Fu Hong Cha, qui sont tous des thés d’origine et
de qualité supérieure récoltés sur des
variétés à grande feuille et qui subissent en dernière étape un calibrage mécanique, consistant
à soumettre les feuilles à une sorte de "tapotage" avec d'épaisses lames en bois, qui les cassent en fragments réguliers, que l'on trie ensuite en fonction de leur taille , et ainsi on obtient des thés homogènes, ce qui permet une infusion rapide.
**les Hong Cha classiques, qui sont des thés orthodoxes, en
feuilles entières, classés selon la nomenclature internationale en grades F.O.P. /Flowery Orange Pekoe, ,
puis O.P.et puis P, ensuite en Broken et puis en Fannings et Dust, comme les
thés noirs de l’Inde, du Sri Lanka, de l'Afrique de l'Est etc ;
**les Xiao Zhong Hong Cha : qui sont des thés d’origine
en provenance du Fujian, Wuyi Shan, village de Tongmu ; préparés avec les cueillettes de théiers d’une variété à
petite feuille, ils sont pleinement oxydés et
subissent ensuite un fumage, qui
leur confère un goût unique : c’est le célèbre Lapsang Souchong, et il y a aussi son
« cousin » le Tarry Souchong, qui est produit à Taiwan.
Les thés rouges continuent à être très appréciés en Occident et les papilles chinoises commencent à les trouver délicieuses depuis quelques années. La production est donc en augmentation: en 2013 et selon les statistiques officielles elle a été de 198.000 t .