N° 24, art. 1
Cafés servis lors d'un séminaire sur le thé |
Thé et café , inséparables ! |
"Thé et café, pleins de points communs pour ces deux tasses incontournables"
Commençons par le dossier « botanique » : les deux cultures prospèrent dans la zone subtropicale et tropicale tout autour du globe, les deux aiment les sols volcaniques et demandent beaucoup d’eau.
Chacune des deux familles de végétaux possède une variété d’altitude demandant des nuits fraîches et une variété de plaine qui supporte la chaleur :
Pour les thés il s’agit des :
**camellia sinensis var.sinensis, ou théier chinois, au port buissonnant, à petites feuilles semi rigides et qui peut grimper à plus de 2 000 m
**camellia sinensis var.assamica, ou théier d’Assam, au tronc unique, à larges feuilles souples et qui prospère dans les plaines et en climat torride, dont la récolte s’effectue toute l’année et est généralement transformée en thés noirs . Cette variété a été « découverte » en 1823 par Robert Bruce auprès de la tribu des Singhpo dans la haute vallée du Brahmapoutre , près de Rangpur, dans le Bangla Desh. Il a fallu encore 10 années de discussions entre botanistes britanniques avant de reconnaître officiellement que c’était bien un théier.
Pour les cafés il s’agit des :
** cafés arabica, aux grains plus allongés et à teneur moins forte en caféine, et qui ne peut supporter de « descendre » en dessous de 600/800m,
**cafés robusta, aux grains plus arrondis et à la teneur en caféine environ deux fois plus élevée, qui prospèrent en plaine et supportent les fortes chaleurs des zones tropicales ; cette variété a été identifiée par un botaniste français, dans la forêt tropicale du Congo en 1897.
Notons aussi que la teneur en caféine plus forte des feuilles de thé et des grains de café des variétés poussant en plaine est une sorte d’arme de défense de la plante, car cet alcaloïde très amer aide à repousser les insectes et autres parasites bien plus nombreux que dans la fraîcheur des collines.
Parce que les besoins de ces deux cultures sont très similaires de nombreux pays producteurs cultivent à la fois « thés et cafés » et a-t’il parfois été possible de changer de plantes d’un seul coup. Ainsi au Sri Lanka, où toutes les plantations de café avaient été ravagées par un parasite en une année, on a remplacé le café per le thé, c’était radical ! Et cela s’est produit en 1875 ! Depuis les thés de Ceylan ont continué à prospérer et à s’étendre, faisant de l’île un des 4 plus grands producteurs de thé du monde.
caféier à Makaibari |
les grains séchés |
De même lorsque les colons britanniques ont installé leur villégiature dans les hautes collines du Darjeeling dans l’année 1850 certains ont essayé d’y implanter des caféiers, et il en reste dans certains jardins, notamment à Makaibari.
Le caféier est originaire d’Ethiopie et a été implanté au Yémen vers l’an 700 d’où il a ensuite entamé sa conquête du monde, vers les Amériques notamment. Les chercheurs ont depuis exploré la forêt éthiopienne où ils ont identifié plusieurs centaines de génotypes, que l’on cherche à implanter dans des cultures pour la qualité gustative de leurs tasses. Toutefois il n’y a pas eu dans le domaine du café le développement d’un patrimoine culturel et de terroirs anciens et renommés depuis des siècles, comme nous le connaissons pour le thé en Chine.
L’enjeu économique considérable constitué par ces deux matières premières agricoles les a pendant des siècles soumis à des monopoles des gouvernants des pays d’origine, le Sultan du Yémen et l’Empereur de Chine. Ces deux monopoles ont été cassés par la force et la fraude à l’époque des grands empires coloniaux ; par la suite les puissances occidentales ont massivement investi dans leurs colonies afin de se garantir l’autonomie de leurs approvisionnements en thé et café.
Depuis l’indépendance politique de la plupart des pays producteurs le commerce du thé et du café est devenu une source de revenue très importante. Parfois tarie suite à des conflits politiques internes graves ces cultures ont toutes retrouvé un chemin de prospérité et une certaine stabilisation vers la fin du 20e siècle.
La stabilité politique rétablie c’est parfois par les aléas de la météo que les cycles de production ont été perturbés avec des conséquences très néfastes sur les récoltes, entrainant la spirale « diabolique » : hausse de prix, suivie de surproduction entrainant une chute des prix, à cause d’une demande peu élastique et qui ne suit pas, résultant dans des difficultés économiques et puis l’abandon des cultures.
Afin de garantir une meilleure stabilité l’ONU a été amenée à créer des organes régulateurs,
** pour le café : un accord international géré par le « International Coffee Organisation » -ICO- basée à Londres depuis 1963 ;
**pour le thé : un « Groupe Intergouvernemental sur le Thé », installé au sein de la FAO à Rome depuis 1975 ;
et le » International Tea Committee », installé à Londres depuis 1933 ;
Ces structures sont présentées en détail dans les n° 2 et 3 de la NPT : http://nptdumois.blogspot.com
Les marchés dans les pays consommateurs se partagent entre les produits « mainstream » de qualité courante, dont font partie environ 95% des produits, et les thés et cafés de terroirs, haut de gamme, spécialités.
A ce jour il y a deux cafés à IGP : le café de Colombie et les café d’Antigua, au Guatemala ;
compétition de baristas |
dégustation de cafés fins |
et puis deux thés à IGP : les thés du Darjeeling et le Longjing Cha.
Si les « cafés d’origine » ont depuis bientôt 20 ans leurs structures internationales de mise en valeur – SCAA,SCAE,CQI, « Cup of Excellence » et puis les championnats mondiaux de préparation de la tasse, de dégustation, le thé n’a pas encore franchi ce pas.
Pourtant une structure globale pour la « sommellerie du thé », proposant une vraie « éducation en thés » ainsi que leur préparation et dégustation pourrait valoriser ce créneau à forte valeur ajoutée, à la fois pour stimuler le marché et aussi pour le plaisir des amateurs de thé.
La « Nouvelle Presse du Thé » reviendra sur ce sujet vraiment porteur prochainement.
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