Ces 86 jardins enregistrés ont déjà fêté leurs 150 ans d’existence pour
la plupart et continuent à produire des thés délicieux.
Rigoureusement encadrées par le dispositif de contrôle d’origine
du Tea Board of India et mises en valeur par un joli logo, leurs quatre récoltes
annuelles font la joie des amateurs de thé.
C’est en Europe, au Japon et aux Etats-Unis principalement
qu’on est prêt à débourser le prix élevé de ces thés, justifié par la rareté de
ces tasses exquises. C’est peu courant de les trouver sur place, où l’on
consomme surtout les thés plus abordables des autres régions, Dooars et Terrai,
Assam, l’Inde du Sud et Kangra.
Beaucoup de choses ont changé depuis le retour de la Chine sur le marché du thé
dans les années 1980/90 et l’énorme augmentation de la production de thé dans
le monde, qui a plus que doublé en 20 ans pour atteindre 4,9 millions de tonnes
en 2013.
Et le Darjeeling dans ce contexte ? Avec une production qui tourne autour de
10.000 t , bon an mal an, cela représente à peine 0,2% du total mondial
actuel!!
Bordée par les sommets des contreforts de l’Himalaya et
ravinée par des fleuves turbulents qui descendent des hauts plateaux, cette
région d’à peine 3.200 km² n’est pas extensible ! Les jardins de thé
établis sur les pentes et versants des
collines ont en plus besoin des forêts environnants, pour leur biodiversité et
leur interaction avec le soleil, le vent, les pluies et le tempêtes de
grêle, fréquents dans ce micro climat particulier. La règle de
jadis qu’il faut 2 ha
de forêt pour 1 ha
de thé semble de moins en moins
respectée. Et par ailleurs il y a les villages des cueilleurs, installés au
sein des plantations, qui ont besoin de leurs cultures vivrières, potagers et
champs de céréales, pour se nourrir, des près pour leurs animaux.
théier ancien |
Les 86 jardins enregistrés à ce jour par le Tea Board ainsi
que les quelques coopératives n’ont donc qu’environ un petit tiers des surfaces
cultivables à leur disposition pour leurs plantations de thé ! Un autre
facteur qui pèse lourdement sur le volume de production est la baisse du
rendement, qui suit la mise en culture bio, sans pesticides et sans
fertilisants chimiques ; la première année cela peut faire perdre jusqu’à
un tiers du volume, pour se rétablir en suite, mais sans jamais atteindre les
récoltes antérieures. Aujourd’hui on nous dit que plus de 95% des plantations
sont passées en bio.
Et puis, il y a aussi le vieillissement des théiers qu’il
faut remplacer au fil des années. Cela fait beaucoup de soucis pour les
directeurs des plantations et les propriétaires, qui doivent investir et gérer.
Aujourd’hui beaucoup de jardins appartiennent à des
familles venues du Rajasthan, réputées
être des travailleurs infatigables et des gestionnaires pointilleux. Posséder
plusieurs jardins facilite aussi souvent la gestion et parmi les plus gros
citons: les Lohiya qui ont 13 jardins,
dont Chamong, Phoobsering, Tukdah…,
les Bansal qui en ont aussi 13 avec Ambootia, Happy Valley..,
les Mohan qui en ont
7 avec Seeyok, Selimbong ….,
les Jayshree , qui en ont aussi 7, avec Puttabong, Singbulli
….
Rajah Bannerjee |
le groupe britannique
Goodricke qui en possède 5, avec Margaret’s Hope, Castleton ….
Ces gros propriétaires habitent tous en ville, à Calcutta ou
même à Delhi ; les seuls qui sont toujours restés sur place, par passion
pour le thé, par solidarité pour les villageois et par choix personnel sont Rajah Bannerjee,
le mythique patron de Makaibari,www.makaibari.com
et Shiv K. Saria, qui
possède en famille Rohini et Gopaldhara www.gopaldharaindia.com
Shiv K. Saria |
Pour rajeunir et diversifier les planteurs ensemble avec les scientifiques et les
agronomes du Tea Board ont cherché des solutions dans la botanique, en
introduisant de nouveaux cultivars.
un clonal Jungpana |
A l’origine les théiers du Darjeeling étaient tous des « china jats », émanant des
graines et des boutures apportées de Chine par Robert Fortune, vers 1845/55.
Plusieurs essais ont été fait depuis une vingtaine d’années
et c’est le cultivar AV2, introduit en 1978 par M.T.S. Tiwari, rejeté au début
par les acheteurs allemands, qui réunit maintenant tous les suffrages.
Originaire de l’Assam, mais développant un plus petite feuille dans le rude
climat des altitudes, ce théier a un excellent rendement et une pousse
vigoureuse, très riche en bourgeons. De plus ce climat aux nuits fraîches
stresse très fort les arbustes, ce qui provoque le développement d’une grande palette
de qualités gustatives. D’autres cultivars sont en exploration, donc il y aura encore
des surprises à venir.
Ces quelques lignes cherchent à montrer la richesse de ce terroir et le
caractère exceptionnel de ses récoltes
en quantités restreintes, qui expliquent leur attrait et leur prix.
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